( En un peu moins d'une heure...)
Là où j'ai ouvert les yeux me semblait là où je vis et respire,
où je me déplace, laisse une trace, une empreinte tant soit peu.
Mais avant de me réveiller
- lequel des réveils, sur quel lit, dans quelle étagère ? -
il y a cette volonté, cette voix, conscience ou inconscience
qui demande de se lever,
qu'il en est temps, qui fait signe de revenir.
Mais trop loin, trop profond, là où j'éprouve la première sensation
de me réveiller, je n'ai me semble-t-il que les yeux pour seul sens
- j'ai entendu il est vrai la voisine et un de ses amis dans le couloir,
la porte et la clé...
Transparence peut-être.
Sans aucun autre mouvement que de faire un geste, remuer les bras,
je semble en fait m'affoler pour rien, avec cette impression simple
de battre des mains dans le vide, sans prendre prise nul part.
Puis, à y penser comme songer,
la respiration semble absente dans la noyade,
- béant batifolage des eaux du sommeil -
mais elle ne l'est pas, ou tout du moins
elle est derrière l'affolement, le peur de ne plus respirer, d'être mort.
Un peu rassuré, se débattant toujours trop mollement ou en vain,
cherchant à se réveiller, à se lever, les brumes se dissipent peu à peu
mais semblent disparaître par enchantement, indépendamment
de ma volonté - je ne peux reprendre conscience immédiatement,
un temps me suspend entre les deux
(sommeils, mémoires, espaces, rêves, je ne sais).
Je refais surface d'un seul coup, l'apesanteur reprenant ses droits,
allongé sur le dos - elle est la posture mortelle par excellence,
celle du mort et celle qui vous envoie presque à la mort -
mes yeux s'infiltrent du fluide lumineux, celui de la réalité,
mes membres engourdis se réveillent à leur tour.
Je me sens revenir de loin et être là pour preuve.